A l’heure où, dans nos sociétés de consommation, l’accès au bonheur – matériel ou non – semble être un droit fondamental, il parait pertinent d’offrir une aide à tout patient qui se sent en souffrance dans le domaine de la sexualité. Or parler de la sexualité avec les patients n’est pas toujours aisé et intégrer nos connaissances en sexologie dans la réalité complexe est parfois difficile. « Le sexologue est assimilé à un aventurier dans l’art de guérir chez un professionnel qui garde foi dans les relations humaines » (Prof. C. Reynaert, congrès du Centre de Médecine Sexuelle du CHU UCL Namur).

Auteur
Dr Marie-France Philippe, endocrino-diabétologue et sexologue
Une étude sur la sexualité a été réalisée en France en 2009. 1.500 Français, 750 hommes et 750 femmes, âgés de 40 à 80 ans, choisis au hasard, mais représentatifs de la population générale, ont été interrogés entre 2001 et 2002 par téléphone grâce à un questionnaire élaboré pour cette étude. Celle-ci met à jour une fréquence non négligeable de patients atteints de dysfonctions sexuelles. Les plus fréquentes étaient, sans surprise, l'éjaculation précoce (16%) et la dysfonction érectile (15%). 13% des hommes rapportaient aussi un manque d'intérêt sexuel, 10 % une anorgasmie, 7,5 % une absence de plaisir pendant les rapports et 3,6 % des douleurs pendant les rapports. Chez les femmes, les dysfonctions sexuelles les plus évoquées étaient : le manque de désir sexuel (20,9%), l'absence de plaisir (17,8%), l'incapacité à atteindre l'orgasme (15,8%) et les difficultés de lubrification (14,3%). Près de 10% rapportaient aussi une dyspareunie. Parmi les personnes souffrant de troubles sexuels, 32,9 % des hommes et 26, 4 % des femmes n'avaient fait aucune démarche dans le but de résoudre leurs difficultés. Parmi ceux et celles qui avaient cherché de l'aide, un tiers seulement en avait discuté avec leur médecin. Il existe, dès lors, un décalage entre la fréquence élevée des troubles sexuels et le faible nombre de personnes consultant pour ces troubles, alors que les personnes interrogées disent souhaiter y trouver une solution*.
C’est dans cette optique que le GHdC a ouvert une nouvelle clinique de la sexualité.
Une approche multidisciplinaire
Les plaintes sexuelles y sont accueillies avec une écoute appropriée, du respect et du professionnalisme. Parce que les dysfonctions sexuelles relèvent rarement d’une seule spécialité, celle-ci proposera une approche multidisciplinaire avec un coordinateur central, le Dr Marie-France Philippe, endocrinologue et formée en sexologie clinique et thérapie sexo-fonctionnelle. La coordinatrice propose, de concert avec un psychologue, un trajet de soins déterminé afin d’aider les patients à améliorer la qualité de leur vie sexuelle. La clinique de la sexualité est le fruit d’une collaboration entre les différentes disciplines qui sont impliquées telle que la gynécologie, l’urologie ou la psychiatrie. Mais nous travaillons aussi en partenariat avec des services dans lesquels les demandes sont plus fréquentes, comme par exemple la cardiologie, la neurologie ou l’oncologie. Il est, par exemple, à présent établi qu’en cas de traitement pour le cancer, la majorité des patients vont avoir une perturbation dans leur sexualité ou une exacerbation de troubles qui étaient déjà préexistants (ASCO 01/2018).
Pourquoi une coordination par un endocrinologue ?
La relation entre dysfonction érectile et diabète est décrite depuis 1798. La dysfonction érectile est 3 fois plus fréquente chez le diabétique par rapport à la population générale. C’est en réalité l’une des principales causes organiques des troubles de l’érection : 32% des diabétiques de type 1 en souffrent et 46% des diabétiques de type 2 ! Or, ce trouble n’est pas le seul identifié chez le diabétique. De plus, la femme aussi peut être touchée par la dysfonction sexuelle. Les problèmes sexuels peuvent atteindre toutes les phases de la sexualité féminine : cela va des troubles du désir aux troubles de la stimulation ou excitation (un problème de lubrification ou l’absence ou diminution d’un sentiment d’excitation), une diminution ou absence d’orgasme ou encore des problèmes lors de la pénétration (impossibilité ou douleur). Par ailleurs, des endocrinopathies peuvent retentir directement sur la sexualité, comme par exemple l’hyperprolactinémie qui se manifeste par une baisse de libido.
Dans une attitude de bienveillance, nous mettrons notre disponibilité et nos compétences à l’égard du patient pour répondre aux questions sur la santé sexuelle qui le préoccupe ou dans un projet thérapeutique global pour les dysfonctions sexuelles et les problèmes de couple.
En effet, aujourd'hui encore trop peu de patients ont conscience que faire appel à leur médecin ou un spécialiste de la santé sexuelle pourrait résoudre leurs problèmes sexuels, que la santé sexuelle appartient au domaine médical et, enfin, qu'il existe des traitements efficaces. Dans ce cadre, la sexologie clinique est une discipline qui implique plusieurs spécialités qui vont être essentielles pour comprendre la souffrance des patients.
En conclusion, les problèmes sexuels sont fréquents. Il semble important d’en parler car avoir une bonne qualité de vie passe par une sexualité épanouissante.
* D'après Buvat et coll, Sexual problems and associated helpseeking behavior patterns: Results of a populationbased survey in France. International Journal of Urology (2009) 16.