1ère mondiale: l’IA pour détecter rapidement la résistance au traitement des lymphomes B diffus à grandes cellules
Le lymphome B diffus à grandes cellules (LBDGC) est le type de lymphome non hodgkinien (LNH) le plus courant. C’est un cancer agressif, mais traitable, qui prend naissance dans les lymphocytes B (cellules faisant partie des globules blancs impliqués dans notre système immunitaire). Ces lymphomes sont traités en première intention au moyen d’une chimiothérapie. Mais il arrive que certains ne répondent pas au protocole de base, on a alors affaire à une maladie réfractaire (30 à 40% des patients sont concernés). Le Dr Marie Detrait, CMIO (Chief Medical Informatics Officer) au Grand Hôpital de Charleroi, a développé un outil d'intelligence artificielle capable de prédire le caractère réfractaire d’un lymphome et améliorer ainsi la prise en charge des patients.
Le Dr Detrait développe depuis quelques années des solutions d’intelligence artificielle sur mesure en fonction de problématiques médicales que lui soumettent les médecins. Sa fonction est un trait d'union entre la médecine et la technologie. « C’est un véritable partenariat : l’IA apprend sur des observations et on doit donc lui apporter des données d’apprentissage. Dans ce travail pour ce type de lymphome, 130 cas ont été analysés entre 2017 et 2022. Beaucoup de caractéristiques ont été extraites pour obtenir le profil des patients et de la maladie, de la découverte du cancer aux comorbidités (les maladies déjà présentes au moment du diagnostic). J’ai programmé et testé 5 algorithmes et le meilleur, celui qui a été retenu pour la suite, donne d’excellents résultats, ce qui m’a conduit à la publication d’un article scientifique. Un modèle d’explicabilité des décisions de l’IA a également été implémenté par mes soins afin d’obtenir plus de clarté pour les utilisateurs. Maintenant, nous allons rentrer dans la phase prospective de l’étude, c’est-à-dire que nous allons le tester dans la vie réelle avec les nouveaux cas diagnostiqués à partir de maintenant dans le service d’hématologie ». L’étude prospective se terminera dans 3 ans et une analyse intermédiaire est prévue en juin 2025.
Un outil précieux pour la prise de décision
Le Dr Delphine Pranger, hématologue et spécialiste de ce type de lymphome au Grand Hôpital de Charleroi est enthousiaste face à cette nouvelle avancée car il n’existe pas actuellement de modèle prédictif dans ce domaine. « Lorsque je rencontre certains patients, j’ai régulièrement des « intuitions » par rapport à la résistance de la maladie à une chimiothérapie de 1ère ligne mais je suis vraiment heureuse de pouvoir m’appuyer sur les résultats de cet algorithme pour valider scientifiquement mes intuitions ». Il ne s’agit donc pas de remplacer le médecin mais de lui proposer une aide à la prise de décision. Car l’IA ne dit pas « oui » ou « non », elle présente ses résultats sous forme d’un pourcentage qui correspond à une probabilité, en justifiant les raisons pour lesquelles elle penche ou pas vers une maladie réfractaire (c’est le modèle d’explicabilité de l’IA qui permet cela). Au médecin alors de faire les conclusions qui s’imposent.
De nombreux avantages pour les patients
Le Dr Pranger cite 2 exemples très parlants en terme d’avantages pour le patient : « Tout d’abord, si l’IA détecte une maladie réfractaire, nous aurons tendance à partir plus vite sur une 2e ligne de traitement et éviter ainsi la toxicité de la chimio de 1ère ligne qui, en plus, n’est sans doute pas efficace. Ensuite, certains médicaments ne sont remboursés que si une récidive a lieu dans les 12 mois après le diagnostic. Pour un patient, le pire scénario, c’est que la récidive soit détectée juste après ce délai. Si l’IA nous informe que la maladie a de grandes chances d’être réfractaire, nous planifions des examens d’imagerie médicale poussés (PET-Scan) plus tôt pour ne pas passer à côté de la récidive dans ce délai de 12 mois ».
Ce modèle prédictif une première mondiale.